Des caméras dans les taxis, la belle affaire!

Voilà qu’on nous annonce des caméras dans les voitures taxis dans le but de protéger les artisans de cette industrie, dans laquelle j’oeuvre depuis quelques dizaines d’années. Il serait intéressant que le maire Coderre, en collaboration avec le Bureau de taxi, nous fasse la démonstration de l’amélioration de la sécurité espérée grâce à ce gadget technologique. Dont on imagine sans peine que des entrepreneurs près du pouvoir espèrent retirer d’importants profits. Comme pour les récents lanternons totalement illisibles.

En bref, comment une caméra peut-elle protéger un chauffeur de taxi contre les agressions corporelles, les lacérations au couteau, les coups de barre de fer et les projectiles d’armes à feu ? Les images conservées par une caméra peuvent sans doute aider à retrouver l’agresseur. Qui se recrute le plus souvent dans les catégories les plus marginales de nos concitoyens. Lesquelles en passant sont peu sensibles à l’idée d’être identifiées. Mais pour ce qui est de la sécurité des conducteurs, seules les plaques ou écrans protecteurs peuvent assurer une sécurité raisonnable, comme on l’a constaté depuis longtemps dans des villes comme New York et Paris. Si une telle mesure avait été appliquée au Québec, plusieurs des quelque 60 conducteurs assassinés (la grande majorité des tueurs a été retrouvée sans caméras) depuis un demi-siècle chez nous auraient sans doute eu la vie sauve.

Se greffent à ce projet de révolutionner l’industrie du taxi — qui, en passant, est un service semi-public jamais désigné comme tel — des idées pour le moins stériles de l’administration municipale pour en améliorer les performances économiques. Comme une couleur uniforme obligatoire pour les autos. Qu’il me soit permis de proposer quelques avancées qui pourraient réellement changer les choses :

Nous soustraire à la taxation sur l’essence, comme cela existe pour certains secteurs d’industrie.

L’extension et la visibilité accrue des postes d’attente.

La possibilité de virage aux intersections octroyée aux véhicules du service public.

Le déverrouillage d’importantes artères de circulation automobile, par exemple les rues Saint-Hubert et Christophe-Colomb dans les axes nord-sud, question de décongestionner les rues Papineau et Saint-Denis.

La diminution des pistes cyclables qui ralentissent la circulation automobile de la ville entière pour satisfaire quelque 2,6 % de citoyens en mouvement dans la ville qui utilisent ces voies de circulation au plus sept mois par année.

Ces dernières mesures auraient pour effet d’aider les quelques milliers de chauffeurs de taxi à exercer plus facilement leur métier. Mais également les millions d’automobilistes qui perdent temps et argent, des dizaines de millions de dollars par année en fait, en plus d’augmenter la pollution, depuis plus d’une décennie à Montréal. Il faudrait ajouter l’abolition de l’inique — et sans doute illégal — projet Nez rouge, les tribunaux n’ayant jamais été saisis de cette question, dans les grandes villes. Une initiative à saveur humaniste qui nous prive d’importants revenus durant des périodes cruciales de l’année. Et qui foule au pied les obligations imposées aux chauffeurs de taxi, faisant de tout citoyen qui le désire un professionnel d’un soir du milieu sans qu’il ait à payer les montants qui nous sont imposés : cours obligatoire pour les postulants-chauffeurs (1300$), classification rehaussée du permis de conduire moyennant des frais, et autres.

Mais comment faire accepter de telles idées, je me le demande, à des gens dont l’une des préoccupations — qu’ils sont d’ailleurs les seuls à partager — serait de recouvrir l’autoroute Ville-Marie ? Un projet estimé à quelques 2 milliards de dollars ! Des élus et fonctionnaires prétendus visionnaires qui, eux, les adorent les caméras et qui, il faut le souligner, se montrent tout à fait incapables de simplement asphalter de manière correcte les rues de notre ville. Une cité qui fut, il y a longtemps, hélas, la métropole du Canada…

Source : LeDevoir.com

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