Taxis douteux et chauffeurs assortis

Montréalaise de naissance, j’en ai pris des taxis depuis ma petite enfance. J’ai été à même de constater de près la dégradation progressive de cette industrie. Depuis un peu plus de cinq ans, les conditions de transport et les manières des chauffeurs empirent à vitesse exponentielle. À vrai dire, c’est lorsqu’on prend une voiture propre, relativement récente et que l’habitacle n’empeste pas que l’on est surpris. Combien de déplacements n’aie-je effectué la fenêtre grande ouverte, même en hiver… Les étrangers qui débarquent doivent avoir une impression de ville en faillite.

Quant à la connaissance des trajets et celle d’une des deux langues officielles, elles se font de plus en plus rares. De trop nombreux chauffeurs baragouinent, ne savent pas où ils vont et réagissent avec agressivité quand on a le malheur de leur indiquer quel chemin emprunter. Ajoutez à cela, l’attention déplacée et même les agressions qu’ont subies d’infortunées clientes. De même que le mépris affiché de certains qui ignorent carrément la femelle impie assise à l’arrière, comme si elle était une nuisance, un mal nécessaire.

Sans compter l’absence de p’tite gêne d’autres chauffeurs encore, qui nous cassent les oreilles avec les délires des lignes ouvertes, la musique ou les prédications d’un quelconque pasteur. Dans l’tapis, sans solliciter notre avis. Et qui regimbent lorsqu’on leur demande d’actionner l’air climatisé -quand leur véhicule en est pourvu- par temps de canicule. J’oubliais ceux qui sont en conversation animée au cellulaire et se foutent du parcours, du code de la route et du client comme de leur dernière culotte.

Prendre un taxi à Montréal aujourd’hui, c’est toujours se demander sur quoi, sur qui, on va tomber. Et passer 6 fois sur 10, un mauvais quart d’heure, résigné. La plupart du temps, je mets les écouteurs de mon I Pod et je répète un mantra. Sans blague! Sauf quand il m’arrive, -Oh Happy Day- , de profiter d’un conducteur poli qui parle juste ce qu’il faut et me conduit prestement à destination sans détours inutiles. Ou de faire la connaissance d’un autre, plus volubile et sympathique qui veut discuter de tout. Ils existent aussi mais ils sont l’exception, pas la règle à laquelle le client est en droit de s’attendre.

Dans ce contexte, on ne peut qu’encourager toute nouvelle politique du taxi, de même que toute mesure visant le resserrement des critères d’embauche et la modernisation nécessaire des flottes de véhicules. Quant aux taxis écolos et intelligents dont rêve le maire Coderre, cela équivaudrait à passer de l’âge de pierre à l’ère cybernétique en un claquement de doigt. L’intelligence de la machine (sic) ne remplacera jamais la compétence et le savoir-vivre d’un chauffeur. C’est l’éducation au civisme qu’il faudrait entreprendre prioritairement. Parce qu’une voiture à la fine pointe de la technologie conduite par un chauffeur malpoli et inepte, ça ne mène pas bien loin. Ça ne restaure pas l’image d’une ville en tout cas. Mais ça, personne n’en parle. Dans nos administrations, le facteur humain est toujours le dernier à être pointé. Même lorsqu’il est au coeur des problèmes.

Source : Journal de Montréal

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