De travailleurs de la construction à chauffeurs de taxi

Troquer son marteau et son casque contre un volant de taxi et une casquette :une réalité à laquelle doivent s’habituer certains travailleurs de la construction de la Côte-Nord, où l’embauche de main-d’œuvre locale sur les chantiers pose problème.

Les entreprises spécialisées ont souvent leur siège social à l’extérieur de la région et sélectionnent des travailleurs aussi de l’extérieur. Des Nord-Côtiers se retrouvent sans emploi. Ils doivent donc changer de carrière.

« Je m’attendais à pouvoir travailler sur le chantier de la Romaine au courant de l’hiver. Cette année, ça n’a pas été le cas, avec la nouvelle loi 33 », explique le menuisier-charpentier Éric Dufour, converti pour un temps en chauffeur de taxi.

L’entrée en vigueur de cette loi 33 a modifié la méthode d’embauche des travailleurs en éliminant le placement syndical.

La Loi éliminant le placement syndical et visant l’amélioration du fonctionnement de l’industrie de la construction est entrée en vigueur en décembre 2012. Elle avait été présentée en 2011 par Lise Thériault, à l’époque ministre du Travail et aujourd’hui vice-première ministre et ministre de la Sécurité publique au sein du gouvernement libéral de Philippe Couillard.

« Nos représentants syndicaux qui nous connaissaient pouvaient nous placer, nous suggérer aux compagnies. Cette année, ils n’avaient pas le droit de le faire, sauf si la compagnie avait fait une demande à la CCQ [Commission de la construction du Québec]. Cette année, les compagnies qui étaient au chantier de la Romaine n’ont pas fait de demande », ajoute Éric Dufour.

Hydro-Québec indique que, sur environ 1800 employés, 42 % d’entre eux proviennent de la Côte-Nord. La moitié des travailleurs oeuvre dans la construction.

La loi reste tout de même imparfaite selon les travailleurs de la Côte-Nord.

« On représente 1 % du Québec, les 99 % qui reste veulent travailler aussi. On demande juste un minimum de respect. On n’est pas contre le fait que les entreprises de l’extérieur aient besoin de protéger leur noyau [de travailleurs], ça le prend. Amène-le ton noyau ! Mais on demande un 70 % de représentativité, ce n’est pas la mer à boire », déclare le représentant syndical de la FTQ-Construction, Bernard Gauthier, dit Rambo.

Le problème pourrait affecter d’autres régions du Québec. « C’est en train de brimer l’économie de chaque région. On parle pour la Côte-Nord, mais ça pourrait être la Gapsésie, ça pourrait être le Bas-Saint-Laurent, ça pourrait être toutes les régions du Québec », lance Éric Dufour.

Si M. Dufour a passé quelque temps derrière un volant, il a pu mettre son taxi au garage pour un moment puisqu’il a retrouvé un emploi dans une entreprise de la région.

Certaines entreprises de sous-traitance de Sept-Îles parviennent à obtenir leur part des contrats attribués sur les vastes chantiers.

D’après le reportage d’Alix-Anne Turcotti

Source : Radio-Canada.ca

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